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Photo du rédacteurPatrick Gheysen

L'aspirateur géant !

« Un aspirateur géant dont le sac serait troué ». C'est ainsi que le chercheur Alan Jamieson décrit le milieu évangélique, déployant son énergie dans le recrutement de nouveaux membres alors qu'il en perd nombre d'autres.

Ce constat courageux, dont le Christianisme Aujourd'hui se fait l'écho dans une récente parution, n'est pourtant pas forcément défaitiste. Mieux vaut appeler un chat un chat et ne pas se voiler la face devant une réalité incontournable et bien réelle. Les églises évangéliques doivent aujourd'hui se remettre en question, tout autant que d'autres églises historiques plus anciennes, étant atteintes du même syndrome de désaffection que les autres, étant confrontées elles aussi à une crise de décroissance sans précédent.


On peut effectivement faire endosser une partie de ce phénomène à la société « post-moderne ». Un concept très tendance qui ne veut pas dire grand-chose, et qui ressemble à un grand sac qui contiendrait tous les tenants et aboutissants de cette conjoncture défavorable, se résumant principalement à une soi-disant augmentation de la notion d'individualisme et d'affirmation personnelle, au détriment de la notion de « communauté » ou « d'assemblée », chère aux évangéliques, qui s'y accrochent comme un naufragé à son dernier morceau de radeau.


Faut-il pour autant jeter l'eau du bain et le bébé avec ? Certainement pas, et il faut plus que jamais prier pour l'Eglise, pour les églises...et surtout pour toutes les expressions actuelles de l'églises (catholiques, orthodoxes, protestantes, réformées, luthériennes, évangéliques, charismatiques indépendantes, pentecôtistes, etc.). En d'autres termes, il faut continuer à aimer l'église avec passion et à porter sur elle un regard bienveillant et protecteur.


Mais il semble néanmoins évident que la mouvance évangélique à tout autant besoin aujourd'hui d'un nouveau Luther ou d'un nouveau Calvin issus de son sein, que l'église catholique à l'époque du début de la réforme et des guerres de religions ! Cette affirmation en fera sûrement bondir plus d'un, surtout si l'on tient compte du fait que la branche la plus charismatique de la sensibilité évangélique foisonne de prophètes les plus divers et les plus variés (pour ne pas dire avariés), qui semblent pour la plupart être devenus sourds comme des pots, pour ne pas dire myopes comme des taupes. « Faute de vision, le peuple se meurt », c'est la bible qui nous le dit. Et être visionnaire, c'est surtout voir juste, posséder un regard aiguisé, une vue perçante capable de traverser les murs de la bien pensance, les parois épaisses de la pensée unique (souvent trop fondamentaliste), et surtout être prêt à remettre en question ce socle inébranlable de l'autosuffisance des évangéliques : « Nous avons la bonne doctrine ».




En voilà un concept original ! De quelle doctrine s'agit-il ? Il y en a autant que de divisions, branches, sous branches et autre groupuscules, tellement nombreux qu'on ne saurait les identifier tous. Mais bien qu'en désaccord les uns avec les autre, ils ont tous « la bonne doctrine »... Vaste blague, qui malheureusement ne fais pas rire, et permet de mieux comprendre la démarche de maturité et la recherche de cohérence de ceux qui souhaitent assumer leur désir de continuer à vivre pleinement leur foi « hors églises ».


Je cite à ce sujet un nouvel extrait paru dans la revue « Le Christianisme Aujourd'hui », qui à osé lever le voile sur cette situation qui se répand de plus en plus en plus, mais dont personne n'ose parler ouvertement :

« Mais ce qui est nouveau et particulier, c'est que dans un certains nombre de cas, ceux qui quittent une église professante le font fermement décidés à rester attachés à leur foi et à continuer à la vivre, hors cadre ecclésial. Les sociologues se sont penchés sur ce phénomène, en particulier dans le monde anglo-saxon. D'après eux, la tendance va se poursuivre et constituer un défi pour l'église évangélique du XXI siècle ».

« Au secours seigneur, notre barque se remplit d'eau, réveille toi pour nous sauver ! »


Et oui, une fois de plus, Jésus semble bien fatigué et guère disposé à sortir de son sommeil, lourd et pesant comme une tonne d'infortune pour tous ceux qui continuent à réclamer un « réveil spirituel » de grande envergure, alors que le dortoir évangélique se vide à vitesse grand V. Que faire alors ? Aller chercher une bonne dose d'adrénaline et d'auto excitation pour Jésus chez les charismatiques les plus extrémistes, style vin nouveau, cri d'animaux, paillettes et plumes d'anges, dents en or et convulsions hystériques à répétions ? Ou encore se réfugier chez les réformés, à l'abri douillet d'un libéralisme tolérant qui fait du bien, certes, mais qui est aussi parfois tellement tiède, suranné, intellectualisé à l'extrême, qu'il en devient parfois carrément moribond !


La liste serait longue, et pourrait donner lieu à de nombreuses descriptions cocasses, et sans doutes fort irrévérencieuses. Nous en resterons donc là pour l'instant, tout en soulignant l'urgence d'un dialogue ouvert sur ce thème qui touche aux enjeux de l'avenir de l'église en général, et des églises évangéliques en particulier. Paraboles.net s'est fait depuis des années le relais de cette recherche et de cette réflexion, récoltant de nombreux témoignages de « croyants hors églises », vivants souvent avec une espèce d'anathème au dessus de la tête, une sorte d'épée de Damoclès, et devant régulièrement affronter le regard compatissant et néanmoins implacable de leurs anciens frères et sœurs, qui ont parfois la dent dure, et la langue acerbe !


« Qu'ils rentrent dans les rangs », clame le pasteur De Coester à la fin de l'article du « Christianisme Aujourd'hui ». « Je ne veux voir qu'une tête », nous dit-il en d'autres termes, comme un adjudant qui aurait avalé son parapluie. Il a même mis en place des cellules « d'écoutes », dont le but est de réduire les résistances et les faux arguments des « rebelles » pour les ramener dans le giron de l'église (évangélique, cela va s'en dire).


En effet, sans remettre en question l'intégrité des motivations de ce pasteur, une autre question bien concrète se profile à l'horizon : qui va payer la dîme désormais ? N'oublions pas que les pasteurs ne vivent pas que d'amour et d'eau fraîche, contrairement à Jésus qui a eu l'avantage et la bonne idée de ne fonder aucune assemblée d'aucune sorte, ce qui lui à épargné un certains nombres des soucis qui accablent nos braves pasteurs et prêtres de nos jours ! C'est déjà bien douloureux de perdre tant de brebis, mais en plus, ou va-t-on désormais trouver l'argent pour faire tourner la boutique (la fameuse dîme, ou le denier du culte, que l'on collecte avec tant de détachement, mais que l'on compte ensuite avec tant d'empressement).


Et de plus, comme tout pasteur qui se respecte à de l'ambition pour son assemblée, les défections que n'arrivent plus à masquer l'arrivée de nouveaux membres fraîchement convertis (denrée de plus en plus rare par les temps qui courent) génèrent forcément beaucoup de découragement et d'incertitude.


« Passons sur l'autre rive » pourrait être le nouveau mot d'ordre du Christ, dans ce moment charnière où il semble urgent d'oser tout remettre à plat, avec peut-être un temps de jachère, pour laisser la terre des cœurs de reposer quelques peu, et semer ensuite de nouvelles semences, reçues du Seigneur lui-même, des semences de vie, de liberté et d'ouverture, qui seront porteuses de l'église de demain. Et demain n'est pas si loin, car demain est déjà à nos portes...


Patrick GHEYSEN, pour Paraboles.net (tous droits de reproductions réservés)

Sources des extraits : http://www.christianismeaujourdhui.info/

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